Le suivi HLiN (Huîtres du Littoral Normand) suit la colonisation et le recrutement de l’huître creuse sur les côtes normandes depuis 2010. Après un recrutement important pour la Normandie en 2017 (sauf sur Granville), les conditions climatiques du printemps et de l’été 2018 laissaient supposer un apport encore plus important de nouveaux individus. Les résultats observés au cours de cet hiver sont venus contredire les attentes, démontrant que les paramètres permettant un recrutement massif sont multiples.
Un recrutement 2018 faible…
Les densités d’huîtres sauvages observées sur la côte ouest du Cotentin (Manche) sont suffisamment élevées pour avoir un impact sur l’écosystème côtier de certains estrans rocheux de cette côte. Des sites comme les falaises de Champeaux ou de Granville, ou encore le secteur ostréicole de Saint Germain sur Ay sont des zones de recrutement d’huîtres parmi les plus importants de Normandie. Même si les densités relevées restent très inférieures à celles observées dans d’autres régions françaises, un suivi de la colonisation et du recrutement est initié en 2010, puis conforté en 2013, afin de suivre cette population. Sur ces sites, un suivi annuel est effectué (colonisation totale et recrutement des nouveaux individus). Le même suivi est effectué à Portbail, un peu plus au nord pour observer si cette colonisation a tendance à s’étendre le long du Cotentin. Sur d’autres sites, un suivi de la densité est effectué tous les 3 ans.
Tableau 1 : Comptage de la densité de recrutement sur les zones de suivi (ind / m²)
Pour l’année 2018, les résultats montrent que le recrutement est relativement faible sur l’ensemble des points de suivi mais homogène, hormis Portbail où le recrutement est inexistant. Ce résultat montre que l’année 2018 est insuffisante pour renouveler le stock d’huîtres sauvages.
Le suivi de la colonisation confirme la stabilité des densités d’huîtres entre 2017 et 2018. On peut simplement noter une augmentation sur Blainville sur Mer (station suivie tous les 3 ans), probablement due à un recrutement important en 2017.
…malgré des conditions considérées comme favorables
On peut donc voir une différence en termes de recrutement entre 2013 (recrutement très important sur Carolles), 2016 (année blanche), 2017 (recrutement important sur Carolles et St Germain sur Ay) et 2018 (recrutement faible). Il est donc intéressant de comparer la météo printanière, correspondant à la période de maturation des géniteurs, et estivale, correspondant à la période de vie larvaire nageuse, qui doit bénéficier d’une température supérieure à 19°C pour s’assurer d’une bonne survie.
Sur la période printanière, on peut regrouper les années 2013 et 2016 d’un côté, plus froides et 2017 et 2018 plus chaudes. Par contre, pour la période estivale, on voit que la température de 19°C est toujours atteinte, tout juste en 2016 et 2017, assez à très largement au-dessus en 2013 et 2018. Au regard de la température de l’eau, l’année 2018 semblait propice à un recrutement important (conditions chaudes au printemps et en été), mais le résultat montre qu’il n’en est rien, alors que des années plus froides au printemps ou en été donnent de meilleurs résultats.
Ces résultats montrent que bien d’autres facteurs interfèrent dans le phénomène de recrutement, comme les courants marins dont de premiers résultats obtenus depuis 2013 ont montré la variation possible de leur course en fonction de différents facteurs. Il apparait qu’il est donc encore difficile de prévoir le recrutement sur les côtes du Cotentin et de déterminer les causes d’un recrutement pléthorique.