Diagnostic de la qualité de la masse d’eau de l’archipel de Chausey : Comprendre pour agir

Publié le 29 décembre 2021 | Mer & Littoral, Nos travaux, Ressources documentaires |

Le Conservatoire de l’espace littoral est chargé de mener une politique foncière de protection des espaces naturels littoraux. En 2007, le Domaine Public Maritime de l’archipel de Chausey lui a été attribué. Cette attribution a été renouvelée en 2019. Ce nouveau « contrat » fixe le domaine d’action du Conservatoire à Chausey. Parmi ces actions, le Conservatoire est chargé depuis ce renouvellement d’une veille et d’une participation aux actions de prévention et de diminution des pollutions et de toute atteinte à la qualité des eaux. Pour ce faire, le Conservatoire du littoral souhaite disposer d’un état de la connaissance afin d’orienter au mieux son action en faveur de cette aire marine protégée.

Cette étude s’inscrit dans cette volonté et fait un diagnostic de la qualité de l’eau au sens large de la masse d’eau de Chausey. La démarche adoptée est un état de l’art des données de qualité de l’eau disponibles, des suivis mis en place, de la règlementation locale et globale concernant la qualité de l’eau. Cet état de l’art est associé à une analyse des risques sur le territoire de Chausey et à la rencontre des acteurs intervenant sur cet espace en tant que scientifiques, gestionnaires ou usagers.

Cette étude est à vocation opérationnelle. Le diagnostic montre que la masse d’eau de Chausey est de bonne qualité globale et qu’elle est le siège de nombreuses interactions qui en complexifient la compréhension et la gestion. Le travail a permis d’aboutir à une meilleure compréhension des enjeux de qualité de l’eau de l’archipel et à une série hiérarchisée de propositions de suivi à mettre en place pour améliorer la connaissance vis-à-vis de la qualité de la masse d’eau et des pressions qui s’y exercent.

Le rapport de synthèse est disponible ci-dessous en téléchargement.


Archipel de Chausey

Le conservatoire du littoral a confié au Symel la gestion de l’archipel de Chausey

Le Conservatoire de l’espace littoral et des rivages lacustres, établissement public de l’Etat, est chargé de mener une politique foncière de protection des espaces naturels littoraux. En Normandie, il intervient sur plus de soixante-dix sites naturels littoraux et estuariens qui représentent 31 000 ha classés. A ce titre, 14 000 hectares de terrains (dont 5000 ha de Domaine Public Maritime) sur 100 kilomètres de rivages relèvent du domaine du Conservatoire du littoral. L’entretien de ce patrimoine est confié à quatre gestionnaires départementaux. Dans le Département de la Manche, le Conservatoire du littoral intervient notamment sur l’archipel de Chausey (sites classé et Natura 2000), où il est propriétaire de plus de 6 hectares de terrains sur la Grande Île. Par convention d’attribution, il assure en outre, depuis 2007, la gestion des 5 000 hectares du Domaine Public Maritime de l’archipel. La gestion effective de l’archipel est confiée par le Conservatoire au SyMEL (Syndicat Mixte des Espaces Littoraux de la Manche). Renouvelée en 2019, cette attribution fixe un cadre précis pour l’intervention du Conservatoire sur les 12 prochaines années. Les actions menées sont en faveur du patrimoine humain, des herbiers de zostère, des sédiments et récifs ou encore des oiseaux marins et de l’estran et des mammifères marins. Ces actions reposent entre autres sur une veille et une participation aux actions de prévention et de diminution des pollutions et de toute atteinte à la qualité des eaux. Pour ce faire, le Conservatoire du littoral souhaite disposer d’un état de la connaissance de la qualité la masse d’eau de Chausey afin d’orienter au mieux son action en faveur de cette aire marine protégée. L’objectif est de limiter sa dégradation selon les critères de la Directive Cadre Stratégie pour le Milieu Marin (DCSMM)  et de la Directive Cadre sur l’Eau (DCE).

Faire un état des connaissances

Cette étude consiste donc à faire cet état des connaissances dans un premier temps. Ensuite, il s’agit de proposer une hiérarchisation des enjeux de qualité de l’eau puis des actions à mettre en œuvre pour suivre cette qualité. Cette hiérarchisation se fera sur la base

–              D’entretiens réalisés avec l’ensemble des acteurs intervenants sur Chausey

–              De l’analyse des données existantes

–              De l’analyse des pressions anthropiques ou naturelles exercées sur la masse d’eau

Le Conservatoire associé à son gestionnaire, le SyMEL, le CD50, et le SMEL forment un groupe de travail pour répondre à cette demande et encadrer le présent projet.

                Le présent rapport propose d’abord une synthèse des entretiens réalisés auprès des usagers du territoire, des gestionnaires et des producteurs de données. L’objectif de cette première partie est de comprendre les enjeux présents autour de la qualité de la masse d’eau de Chausey et les suivis qui, selon les acteurs interrogés, sont prioritaires. Dans un second temps, une analyse des données disponibles est proposée avec des traitements statistiques simples adaptés au peu de données dont nous disposons et à leur hétérogénéité. Il ressort de cette analyse d’une part une évaluation de la qualité de la masse d’eau, et d’autre part une mise en avant des manques dans les suivis actuellement en place. Enfin une analyse de risque vient compléter les deux premières parties pour identifier les facteurs de pression les plus à risque et donc les paramètres de la qualité de l’eau à surveiller en priorité. La dernière partie propose quelques suivis prioritaires qui ont émergé suite aux analyses faites dans les 3 parties précédentes. Le plan est un peu différent dans le rapport complet mais suit cette même logique d’intégration des données. Le rapport complet propose plus de suivis mais qui sont apparus comme moins prioritaires et qui ne sont donc pas repris dans la présente synthèse.

Carte SHOM de l’archipel de Chausey (shom.fr)
Hiérarchisation des enjeux à partir de l’analyse des pressions

Le travail d’analyse des pressions est un outil pour permettre de hiérarchiser les propositions de suivis. Cette analyse est construite à partir d’un travail bibliographique le plus exhaustif et précis possible et à travers les 40 entretiens réalisés auprès des acteurs du territoire intervenant sur l’archipel. Les facteurs de pression identifiés sont des potentiels de pression maximum. Toutes les pressions n’interviennent pas au même endroit de l’archipel, ni au même moment de l’année. Tous les facteurs, anthropiques ou naturels, peuvent avoir une influence sur la masse d’eau et être à l’origine des alertes constatées à Chausey. L’approche choisie est donc une approche du risque, avec un croisement entre l’aléa (la probabilité qu’un évènement se produise), l’intensité maximale de la pression (qui correspond à l’influence potentielle de cette pression sur le milieu), la distance aux zones vulnérables, la localisation et la temporalité des pressions. L’aléa est le point le plus délicat à déterminer, il se base sur une expertise complète du sujet, et sur les connaissances actuelles en courantologie et transports des contaminants.

La masse d’eau de Chausey est de bonne qualité

La masse d’eau de Chausey est, pour l’instant, et au regard des données disponibles, de bonne qualité. Ce constat est le résultat de l’intégration de différents classements règlementaires : les eaux de baignades de Port Marie et Port Homard sont d’excellente qualité depuis le début de leur suivi. La masse d’eau d’un point de vue DCE, est de bonne qualité et le risque de non atteinte du bon état écologique des masses d’eau est nul à Chausey. Le classement REMI est en A depuis le début du suivi et ce pour les bivalves fouisseurs comme pour les bivalves non-fouisseurs. Cependant quelques pics de contamination microbienne répartis sur toute l’année, une pollution plastique notable, et des épisodes d’envasement interrogent sur l’influence des facteurs anthropiques ou non anthropiques, sur la qualité de l’eau à long terme.

Une évolution difficile à estimer

Si les classements sont excellents d’un point de vue règlementaire, il est difficile de prévoir l’évolution de la qualité de la masse d’eau sur le long terme, et de répondre aux questionnements des usagers sur les origines des quelques contaminations observées. Or ces questionnements ne sont pas nouveaux et cherchent des réponses depuis plusieurs années. Les débats ont tendance à s’enliser dans la recherche de fautifs. Il est donc nécessaire de mieux comprendre les déterminismes de la qualité de l’eau de l’archipel pour répondre à ces questionnements et s’assurer de la préservation sur le long terme de Chausey.

L’archipel de Chausey est soumis à de nombreuses pressions anthropiques concentrées pour la plupart en période estivale. La fréquentation est nettement en augmentation depuis plusieurs années et beaucoup d’usagers se plaignent de cette « surfréquentation ».

Si les facteurs humains ne sont pas à négliger, les oiseaux, ou les facteurs abiotiques liés aux saisons ou à un changement climatique global ont probablement également une influence notable sur la variation de certains indicateurs de qualité de l’eau.

Des sources de pollution multiples qui nécessite des protocoles adaptés

De nombreux suivis sont déjà mis en place à Chausey dans le cadre de réseaux nationaux ou régionaux. Quelques études ponctuelles cherchent à développer les techniques de bioindication et à mieux comprendre les enjeux de qualité de l’eau de l’archipel.

A ce stade, il n’est pas possible d’identifier une source de pollution majoritaire, car les protocoles de suivi en place sont adaptés à une comparaison entre masses d’eau mais pas à une compréhension locale au sein d’une seule et même masse d’eau. Les nombres, localisations et fréquences des prélèvements sont insuffisants. La mise en place de suivis pérennes n’est pas envisageable dès à présent, faute d’objectifs de suivi précis. En effet, ne connaissant pas avec exactitude les sources de pollution et surtout leur influence sur la masse d’eau, il est difficile de définir des protocoles de surveillance adaptés. Ce rapport propose donc une série de protocoles à mettre en place afin de mieux comprendre les mécanismes en jeu dans la qualité de la masse d’eau de Chausey et à terme de mettre en place des suivis pertinents, pérennes permettant la surveillance et le maintien du bon état de la masse d’eau.

Les acteurs sont conscients de l’importance de ces mesures et plusieurs projets sont déjà entérinés d’après les entretiens réalisés :

–              Etude d’impact du dragage du port de Granville (SPL, 2020-2021)

–              Etude de l’activité de pêche à Chausey et autour (CRP, 2021)

–              Etude de suivi des sédiments à Chausey et dans le Port de Granville (SPL, 2021)

–              Diagnostic de l’ANC (GTM, 2021-2022)

–              Diagnostic du système d’assainissement collectif (GTM, 2021)

–              Installations portuaires : infrastructure de récupération des eaux noires, réaménagement des installations existantes, chenaux pour faciliter la sortie du port en morte eau. Discussions sur une DSP pour contrôler la fréquentation par les navettes. (GTM, SPL, 2022)

–              Pose d’échantillonneurs passifs dans le cadre des études Gedubouq (4 fois par an sur 2 ans) et Eratus (2020-2021)

–              Suivi plus régulier des habitats benthiques avec a termes la station SSMF01 qui doit être intégrée au nouveau réseau d’observation à venir BenthObs. (LER-BN)

–              Suivi complémentaire dans le cadre du suivi environnemental de la dératisation

Une meilleure compréhension de l’hydrodynamique locale est indispensable

L’analyse des pressions et des données, ainsi que la synthèse des entretiens montrent que pour l’ensemble des aspects de la qualité de l’eau (microbiologique, écologique, sédimentologique), une meilleure compréhension de l’hydrodynamique locale est indispensable. Il s’agit d’une mesure transversale à tous les facteurs de pression. La mise en place d’un modèle de courantologie associé à une approche de flux des polluants est donc une mesure prioritaire. Les données récoltées dans le cadre de cette étude, ainsi que les protocoles proposés permettent d’alimenter un tel modèle. Le descripteur DCSMM associé est le descripteur 7.

L’état des lieux réalisé dans les différentes parties indique que l’enjeu microbiologique est prioritaire sur l’enjeu « envasement », lui-même prioritaire sur l’enjeu écologique, dans la limite de la méthodologie utilisée. Si d’autres mesures non prioritaires sont présentes dans le rapport complet, on peut légitimement classer les 5 premières mesures de suivi dans le tableau suivant.

Contacter le responsable SMEL de ce programme

    Votre nom (obligatoire)

    Votre email (obligatoire)

    Sujet

    Votre message


    Participants au Comité de Pilotage.

    Financeurs.


    Télécharger le rapport d'études

    Diagnostic de la qualité de la masse d’eau de l’archipel de Chausey

    Comprendre pour agir

    2021

    Télécharger le rapport au format PDF

    Partagez cet article :

    Les commentaire sont fermés.