Le bouquet : biologie, écologie et impact socio-économique en Normandie

Publié le 15 janvier 2021 | Nos travaux, Pêche |

Pêché sur l’ensemble des côtes rocheuses de Normandie, le bouquet (Palaemon serratus) est en passe de devenir un emblème pour la Normandie. Quelques dizaines de pêcheurs professionnels exercent traditionnellement cette activité de manière saisonnière (entre août et février) sur l’ensemble du littoral de la Manche, du Calvados et de la Seine Maritime.



Le projet GEDUBOUQ.

Mais depuis une vingtaine d’années, une baisse importante des rendements de pêche de cette espèce est observée (enquête CRP, 2002). Plus récemment, les pêcheurs exerçant leur activité dans les Iles Chausey ont observé une diminution de la taille des crevettes et des quantités pêchées. D’autre part, la pêche à pied aux bouquets par les amateurs représente un enjeu économique et culturel important pour la Normandie. Fort de ces constats, une étude préliminaire a été menée sur cette espèce et les pratiques de pêche. Cette étude a été réalisée en 2019 à partir de la bibliographie et d’une enquête auprès de 164 pratiquants de l’ensemble des côtes de la Manche et du Calvados. Elle a permis d’établir deux constats :

  • Un manque important de données sur la biologie et l’écologie de cette espèce en Normandie ne permettant pas d’établir un diagnostic précis sur l’état de la (ou des) population (s) et du stock ou des stocks.
  • Un fort ressenti sur l’évolution à la baisse des captures (taille et quantité) sur l’ensemble du littoral.

Ainsi, dans le cadre d’un consortium (CRPN, SMEL, Universités de Normandie (Caen, Le Havre), LABEO, AVRIL, CPIE Vallée de l’Orne, Aquacaux, FarView), une étude ciblée sur cette espèce est proposée par la mise en place d’une approche écosystémique des pêches dans un contexte de changement global (évolution de la température de l’eau, acidification des océans, anthropisation du littoral, modification des habitats favorables …). Cette étude est financée par la mesure 28 du programme FEAMP de l’union européenne.

Figure 1 : Logo du programme d’étude GéDuBouq
Des femelles plus grandes que les mâles pour une espérance de vie courte.

Le bouquet présente une espérance de vie relativement courte, entre 2 (Forster, 1951) et 5 ans (Cole, 1958). La fécondation est interne et se déroule juste après la mue de la femelle, qui portera ensuite ses œufs fécondés de manière externe sur ses pléopodes pendant environ 4 mois. Le nombre d’œufs portés par une femelle peut aller jusqu’à 5000.

Figure 2 : Classification et morphologie du bouquet P. serratus

La première reproduction a lieu à un an au début de l’été. Les femelles plus âgées pondent généralement 2 fois en hiver et au printemps et parfois une 3e fois à la fin de l’été. Les femelles présentent une taille supérieure à celle des mâles. Les mesures des tailles de bouquets pêchés par nos soins nous permettent d’établir un diagramme de répartition des tailles qui illustre bien ce dimorphisme sexuel

Figure 3 : Exemple de répartition en taille des bouquets pêchés entre novembre et janvier à Blainville sur mer (50, Manche, France)

Un régime alimentaire varié mais peu documenté

P. serratus est omnivore. Il semble que les macroalgues (vertes, rouges ou brunes) et les petits crustacés (Ostracodes) forment une partie majoritaire de leur régime trophique, mais ils se nourrissent aussi de détritus (matière organique morte) (Forster, 1951).

                Cette crevette présente, aux alentours d’octobre, un comportement de migration saisonnière relativement important depuis les zones littorales et les côtes rocheuses intertidales vers des eaux plus profondes, jusqu’à 40 m de profondeur (elle affectionne tout particulièrement les sites rocheux avec une forte couverture en macroalgues mais il est possible de les retrouver sur les sites sablo-vaseux avec présence d’herbiers marins).

En milieu naturel, en journée, on observe les crevettes creuser des terriers à l’aide de leurs pattes pour s’enfouir. L’observation montre que P. serratus présente une attirance pour les endroits sombres comme les failles, les crevasses rocheuses au niveau des zones à laminaires. Elles sortent la nuit pour chercher leur nourriture (Coppin, 1984).

Figure 4 : Zone de répartition de P. serratus (www.souslesmer.fr)

La pêche au bouquet de loisir se pratique en général à l’aide d’une épuisette, pendant les grandes marées, au niveau de crevasses rocheuses. Un questionnaire a été mis en place afin de mieux caractériser l’effort de pêche produit par les pêcheurs amateurs. 51 personnes y ont répondu entre octobre 2020 et janvier 2021, permettant de visualiser la période de pêche la plus intense (figure 5) et d’avoir des informations sur la connaissance de la législation par les amateurs (figure 6) et leur sensibilité par rapport à l’état de la ressource (figure 7).

La pêche professionnelle est quant à elle assez traditionnelle, mais les faibles volumes débarqués ne doivent pas occulter un chiffre d’affaire important.

Figure 5 : Période de pêche du bouquet en Normandie (France)
Figure 6 : Connaissance des pêcheurs sur la taille minimale de capture
Figure 7 : Remise à l’eau des femelles grainées de bouquet
Figure 8 : Importance économique de la pêche au bouquet professionnel en Normandie
Figure 9 : Législation de la pêche du bouquet en Normandie.

POUR EN SAVOIR PLUS SUR LE PROGRAMME GEDUBOUQ

PARTENARIAT sur un financement FEAMP Mesure 28


Partagez cet article :

Les commentaire sont fermés.