Le SMEL est inscrit depuis plus de 20 ans dans le Réseau National Echouage (RNE), coordonné par l’Observatoire Pélagis, qui est le principal outil de suivi des échouages de mammifères marins. De 1999 à 2009, le réseau a été déclenché de façon épisodique, et depuis 2012 deux agents ont été formés afin d’obtenir l’accréditation pour intervenir sur les échouages de mammifères marins et de tortues, ce qui permet au SMEL d’intervenir de façon régulière et constante dans le réseau. Il est toutefois important de préciser que les chiffres présentés dans ce bilan ne représentent pas la totalité des échouages sur la côte Ouest de la Manche, le secteur d’intervention du SMEL se situant préférentiellement de Granville à Carteret.
Depuis 1999 et jusqu’à ce jour, ce sont les cétacés qui sont le plus rencontrés sur les interventions du SMEL. On y retrouve principalement des dauphins communs, des marsouins, mais également des grands dauphins. De plus, quelques espèces plus rares comme le dauphin bleu et blanc, le dauphin de Risso ou encore les rorquals ont fait l’objet d’interventions. Concernant les pinnipèdes, le nombre d’interventions reste stable, au maximum de cinq par année, le phoque gris y est le plus représenté. Notons aussi un chiffre record pour le SMEL : en 2023, nous recensons 7 échouages de tortues, toutes de la même espèce, des tortues caouannes, dont cinq vivantes qui ont été transférées au Centre d’Etudes et de Soins pour les Tortues Marines de La Rochelle (CESTM).
Le bilan 2023 pour le SMEL.
Pour l’année 2023, les agents du SMEL sont intervenus sur 13 échouages de cétacés, 5 échouages de pinnipèdes et 7 échouages de tortues, dont 5 individus vivants. Le dauphin de Risso était un animal maigre qui présentait un large hématome ante-mortem au niveau du crâne, la cause de la mort a été déterminée comme résultant probablement d’une collision. Un des dauphins communs s’est d’abord échoué vivant et avait été renfloué dans le port de Barneville-Carteret. Malheureusement il sera retrouvé mort le lendemain. C’était un animal maigre mais qui ne présentait pas de pathologies observables. La cause de l’échouage et de la mort reste donc indéterminée. Le grand dauphin était un animal en mauvaise condition physique qui présentait des lésions de type encerclantes en arrière de la tête et sous la pectorale droite. La cause de la mort a donc été déterminée comme résultant probablement d’une capture accidentelle. Les autres cas n’ont pas présenté de particularités, à l’exception des interventions sur les tortues vivantes qui sont présentées ci-après.
Focus sur les 5 interventions concernant des tortues vivantes
Janvier 2023 :
Cette juvénile s’est échouée à Surtainville le 15 janvier 2023. Récupérée par un correspondant du SMEL, son transport a été organisé afin qu’elle puisse être prise en charge le plus rapidement possible au centre de soins de l’aquarium de La Rochelle. Elle a été prénommée Nautica par les scolaires lors des rencontres Argonautica : un projet pédagogique dont l’objectif est de sensibiliser les jeunes à l’étude du milieu marin et du climat en utilisant les données satellites. Equipée d’une balise satellitaire permettant de suivre son parcours, elle a été relâchée avec d’autres congénères à l’occasion de la journée mondiale de l’Océan, le 8 juin 2023. Elle pesait 2,396kg et mesurait 23,2cm !
Mars 2023 :
Cette juvénile a été trouvée sur la commune de Vicq-sur-mer par un particulier, qui l’a amenée au SMEL. Elle a ensuite pu être transférée au centre de soins de l’aquarium La Rochelle.
Novembre 2023 :
Cette juvénile s’est échouée sur la plage de Sciotot le 15 novembre 2023. Trouvé par des promeneurs, l’animal a pu être transféré par un correspondant du SMEL au centre de soins de l’aquarium de La Rochelle.
Décembre 2023 :
Trouvé par un promeneur sur la même plage que la précédente le 11 décembre 2023, l’animal a pu être transféré par nos soins à l’aquarium de La Rochelle.
Echouée morte sur la commune de Portbail, l’animal a été récupéré par le SMEL le 15 décembre 2023. Elle est gardée dans le congélateur du SMEL en vue d’une prochaine autopsie.
Cette juvénile s’est échouée le 23 décembre 2023 à Portbail. Cet individu est certainement le plus jeune de la série, au vu de sa taille. Malgré la période de Noël, les correspondants ont su une fois de plus répondre présent et se mobiliser pour la transférer dès le lendemain au centre de soins de l’aquarium de La Rochelle.
Quelques explications sur les tortues
Sur les sept espèces de tortues marines existantes dans le monde, quatre fréquentent le littoral atlantique français. Il est donc tout à fait normal d’en rencontrer au large de nos côtes. Dans le cas de la tortue caouanne, elle est présente dans toutes les régions tempérées et tropicales de l’océan Atlantique, Pacifique et Indien (Image 9). C’est la seule espèce à nidifier dans des zones tempérées. Elle mesure 90 centimètres à l’âge adulte et son statut de conservation est classé comme vulnérable.
Elle est communément appelée « tortue grosse tête », et se nourrit de petits poissons, mollusques, méduses et crustacés dont elle est capable de casser la carapace grâce à sa mâchoire puissante. Il est possible de la distinguer des autres espèces de tortues marines grâce à la forme de sa carapace qui n’est pas circulaire et de ses écailles en forme de pointes (Image 11).
Elle ne se reproduit que tous les deux ou trois ans. L’accouplement a lieu en pleine mer près de la surface, puis la tortue viendra rejoindre la plage pour y creuser un trou d’environ 50cm de profondeur afin d’y déposer ses œufs. L’incubation dure de 45 à 65 jours, et lorsque les petits d’environ 55mm rejoignent la mer, ils sont très vulnérables et victimes de nombreux prédateurs (crabes, rongeurs, poissons, oiseaux etc.). Ils se laissent ensuite dériver en pleine mer pour rejoindre les zones d’alimentation.
Ce sont des animaux capables de supporter une plage de température allant de 18°C à 25°C. En deçà de 15°C, l’animal entre en hypothermie, et c’est la principale cause des échouages de tortues caouannes sur notre littoral. En effet, les individus juvéniles (15 à 24cm) se trouvant dans le golfe de Gascogne subissent un « coup de froid », les rendant léthargiques et induisant des problèmes de flottabilité. Les courants et les vents les pousseront alors vers les plages où elles finiront par s’échouer, souvent dans un état critique.
C’est à ce moment qu’interviennent les correspondants du réseau, afin d’organiser le plus rapidement possible le transfert de l’animal vers le CESTM de l’Aquarium de La Rochelle, dont l’une des principales missions est d’offrir un centre d’accueil, de soin et de réhabilitation des individus.
Si vous rencontrez une tortue marine sur une plage de notre littoral, il faut immédiatement contacter l’Aquarium La Rochelle au 05 46 34 00 00, et noter l’heure ainsi que la position géographique de l’animal, et si possible prendre une photo pour permettre d’identifier l’espèce, la taille et éventuellement le problème afin d’intervenir dans les meilleurs délais et de façon la plus efficace. En effet, plus vite l’animal est pris en charge, plus vite il sera examiné et soigné. En hiver, les heures sont comptées pour sa survie.
Une fois prévenu, l’Aquarium La Rochelle prendra le relais et contactera le correspondant habilité le plus proche afin prendre en charge l’individu et organiser son transport vers le CESTM.
Pour voir les bilans des années précédentes :
- Bilan 2015-2016 : https://www.smel.fr/2017/04/15/bilan-20152016-des-echouages-de-mammiferes-marins-dans-la-manche/
- Bilan 2017 : https://www.smel.fr/2018/07/02/bilan-2017-des-interventions-du-smel-sur-les-echouages-de-mammiferes-marins-dans-la-manche/
- Bilan 2018-2019 : https://www.smel.fr/2020/03/30/le-reseau-durgence-bilan-des-echouages-2018-et-2019/
- Bilan 2020-2021-2022 : https://www.smel.fr/2023/01/11/bilan-des-echouages-2020-2021-et-2022/