Un Brexit dur : des inquiétudes pour le Comité des Pêches de Normandie

Publié le 17 janvier 2019 | Les actus |
Le vote négatif du parlement britannique sur le Brexit ouvre la voie à un scénario dur. Le Comité Régional des Pêche Maritime et des Élevages Marin de Normandie (CRPMEN) s’invite dans le débat en produisant une analyse des conséquences possibles d’un Brexit dur sur la filière pêche normande.


Rappel de quelques dates.
  • 1964 : Convention de Londres autorisant la pêche dans une zone comprise entre 6 et 12 milles au large des côtes de ses signataires (France, Royaume-Uni, Irlande, Belgique, Pays-Bas, Allemagne),
  • 1970 : égalité d’accès aux eaux et aux ressources dans les Zones d’Economie Exclusive (ZEE) de tous les états membres,
  • 1973 : entrée du Royaume-Uni dans la CEE (avec l’Irlande et le Danemark),
  • 1983 : établissement de quotas de pêche,
  • 2004 : Signature des accords de la Baie de Granville,
  • 3 juillet 2017 : annonce du retrait du Royaume-Uni de la Convention de Londres, dans un délai de 2 ans.
Un constat très alarmant.

Le Conseil Économique Social Environnemental Régional de Normandie (CESER)  dans un document publié en décembre 2017 alertait sur les conséquences d’un Brexit mal négocié pour la filière pêche en précisant toute l’importance de la Normandie dans ces négociations, celle-ci étant la première région française pour l’économie maritime et la 2ème région française pour la pêche.

Le CESER précisait que le secteur de la pêche pourrait être particulièrement impacté par la sortie du Royaume-Uni de l’UE. En effet, la dépendance de la Normandie aux eaux britanniques est très importante puisqu’environ la moitié du poisson y est capturé. Les professionnels de pêche normands auraient beaucoup à perdre d’une réduction de l’accès à ces eaux.

Le CESER ajoutait que la crainte d’une négociation globale dans laquelle le secteur de la pêche pèserait peu ou pire encore, qu’elle serait utilisée comme une variable d’ajustement, est très présente.

Dans ce même document, le CESER faisait un focus sur les îles anglo-normandes qui ne font pas partie du Royaume uni (elles dépendent directement de la couronne britannique). Deux points y étaient soulignés : la nécessaire définition d’une frontière reconnue avec le Baillage de Guernesey et une clarification des conséquences du Brexit sur le Traité de la Baie de Granville négocié avec Jersey.

Dans un document récemment publié (Impact du Brexit sur la flotte de pêche normande – janvier 2019), le CRPMEM précise les inquiétudes des pêcheurs professionnels sur les conséquences très négatives qu’aurait un Brexit dur sur le tissu socio-économique normand.

Les arguments avancés par le comité régional des pêches dans la conclusion de son document sont solides, une part importante des navires normands pêchant dans les eaux britanniques et générant un chiffre d’affaire non négligeable. Le département de la Manche est le territoire le plus concerné via l’activité déployée par des navires normands des ports de Cherbourg, Granville et Carteret.

Des raisons d’espérer une solution raisonnable ?

Le constat est alarmant et ce d’autant que les pêcheurs britanniques ont voté à 92% pour le Brexit. Des « contremesures » sont pourtant envisageables.

Neufs pays européens concernés dont la France, se sont regroupés au sein d’une coalition intitulée « l’European Fisheries Alliance » pour faire entendre une voix significative auprès du parlement européen. Cette coalition avance un argument particulièrement puissant en soulignant que les Britanniques sont dépendants à près de 70% (le site Capital.fr monte jusqu’à 75%) de leurs partenaires européens pour écouler leurs marchandises en particulier pour les crabes, homards et coquilles St Jacques (in le figaro.fr – mars 2017).

Fort de cet argument, l’Union européenne proposerait un accord commercial spécifique (in Les Echos.fr – novembre 2018).

Une amorce de solution du côté de la baie de Granville pourrait faire école. Des discussions se poursuivent entre partenaires (L’État de Jersey,  L’État français, la Normandie et la Bretagne) sur le maintien d’une gestion commune des pêches par-delà le Brexit, sous condition de la démonstration de l’efficacité de la gestion commune des ressources et sous condition des possibilités de débarquements des produits jersiais dans les ports français.

L’émotion est très présente dans ce débat, surtout du côté des britanniques qui nous avaient habitués à plus de flegme. Espérons que la raison va l’emporter et que les intérêts légitimes des pêcheurs normands seront pris en compte.


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